dermatite estivale recidivante des equides
Lésions classiques de dermatite estivale récidivante sur la ligne du dessus et la base de la queue. © C. Lebis
 

La maladie

La dermatite estivale récidivante des équidés est une maladie provoquée par une réaction allergique aux piqûres de certains insectes. On estime qu’en France elle touche de 5 à 10 % des chevaux et poneys, ce qui en fait la principale maladie de peau dans notre pays1. On la trouve sous différents noms : la gratte, les ardeurs, la gale d’été, les cérons…

Rôle des insectes

Puisqu’il s’agit d’une maladie déclenchée par des piqûres d’insectes, son apparition est directement liée à la présence de ces derniers dans l’environnement. Ainsi les chevaux ont plus de risques d’être atteints de Dere dans des milieux favorables à la vie et la reproduction de ces parasites (prés abrités, environnement humide) qu’en montagne ou en bord de mer, où le climat venteux ne permet pas aux insectes volants de se maintenir.

Certains chevaux sont prédisposés

La présence d’insectes piqueurs ne suffit pas. La Dere se déclenche sur certains chevaux génétiquement prédisposés. C’est pourquoi, si les animaux de toutes races peuvent être atteints, on retrouve plus de cas de Dere dans certaines d’entre elles comme, entre autres, le trait Breton, le Frison, le cheval Islandais, le Shetland ou le pur-sang Belge. Et au sein de ces races, il est fréquent de pouvoir identifier des familles (père, mère, frères, sœurs, aïeux ou descendants) dont les membres sont plus souvent atteints de Dere.

Les signes de Dere

Le premier signe de maladie est le prurit, c'est-à-dire de fortes démangeaisons qui donnent au cheval l’envie de se gratter à tout moment et contre n’importe quel support : le sol (en se roulant), les arbres, les piquets de clôture, les parois de l’abri ou du box… Il peut être amené à se mordre ou à se gratter violemment le ventre ou la tête avec un membre postérieur. Les chevaux atteints de Dere finissent par s’infliger de sérieuses lésions de peau : dans un premier temps, on observe des crins ébouriffés et cassés à la base de la queue et de la crinière, puis une perte de poils et une peau épaissie. Les problèmes cutanés s’étendent à la tête, l’encolure, la croupe et souvent la ligne du dessous. Toujours à cause du grattage intensif, les lésions se compliquent ensuite de plaies, de croûtes, et classiquement d’une infection par des bactéries, ce qui augmente encore les démangeaisons.

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Queue ébouriffée, perte de poils sont des premiers signes classiques de Dere. © C. Lebis

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Lésions de grattage sur l’encolure et croûtes à la base de la crinière sur ce Shetland atteint de Dere. © C. Lebis

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Lésions dues au grattage sur la tête de cette jument trait Breton souffrant de Dere. © C. Lebis.

dere cheval ligne dessous

La ligne du dessous peut également être atteinte. © C. Lebis

Comme la Dere est liée à la présence d’insectes dans l’environnement et que ceux-ci sont principalement actifs du printemps jusqu’à l’automne, il s’agit, tout au moins au début, d’une maladie saisonnière. Les premières années, les signes cliniques apparaissent au printemps et disparaissent en hiver, pour réapparaître l’année suivante. Les problèmes s’aggravent d’années en années. Avec le temps, surtout si les lésions apparues à la belle saison sont importantes et surinfectées, ou lorsque les hivers sont doux, la maladie reste présente toute l’année.

Les parasites

Il semble que plusieurs espèces d’insectes piqueurs puissent être à l’origine, ou tout au moins contribuer au déclenchement de la Dere. Ce sont tous des insectes hématophages, c’est-à-dire qui se nourrissent du sang du cheval après l’avoir piqué. Afin de pouvoir s’alimenter plus facilement, ces parasites injectent leur salive qui contient des agents anticoagulants. Ce sont les molécules contenues dans cette salive qui sont à l’origine de la réaction allergique.

Les insectes les plus impliqués dans le déclenchement de la Dere sont des petits moucherons piqueurs appelés culicoïdes. Ils sont très actifs à la belle saison, particulièrement le soir après 17h00 (mais avant le coucher du soleil). Ce sont ces moucherons qui vous piquent le crâne quand vous allez voir vos chevaux au pré le soir. Ils attaquent généralement en nuage. Dans les régions au climat doux, il arrive que les culicoïdes soient aussi actifs en saison froide.

dere culicoides

Moucheron culicoïde sur le pelage d’un cheval. © C. Lebis

D’autres moucherons comme les simulies, les mouches piqueuses (taons, stomoxes…) ou encore les moustiques sont soupçonnés d’être impliqués dans l’apparition de la Dere.

Diagnostic de la Dere

Il ne suffit pas de voir un cheval se gratter la queue pour pouvoir affirmer qu’il est atteint de dermatite estivale récidivante. D’autres affections peuvent donner des signes similaires, dont particulièrement :

  • des parasites de la peau (agents des gales, poux) ou digestifs (oxyures),
  • d’autres maladies allergiques : allergie alimentaire, allergie de contact, allergie environnementale (acariens, pollens, poussières).

Malheureusement il n’existe actuellement aucun test qui permette de confirmer une Dere. Ni les tests cutanés ni les prises de sang n’ont actuellement prouvé leur efficacité à distinguer les chevaux souffrant de Dere des chevaux atteints d’une autre dermatose, ni même d’ailleurs à les distinguer des chevaux en bonne santé ! En effet, beaucoup de chevaux en bonne santé sont positifs aux tests allergologiques (faux positifs).

Pour savoir si un cheval qui se gratte a ou pas la Dere, il est donc nécessaire d’éliminer les autres causes :

  • recherche de parasites sur la peau, d’oxyures en cas de grattage de la queue,
  • test de privation alimentaire (en faisant une modification de l’alimentation – les tests sanguins ou cutanés n’ont pas d’intérêt pour le diagnostic d’une allergie alimentaire),
  • recherche d’une autre allergie. Celle-ci est également très délicate, les tests allergologiques pour les allergènes environnementaux présentant les mêmes faiblesses que pour la Dere. En fait les tests allergologiques ne servent jamais à dire si un cheval est allergique, mais seulement à essayer de trouver la cause de l’allergie quand celle-ci est constatée.

L’historique de l’animal et de sa maladie est aussi important :

  • La maladie est-elle saisonnière (mais attention, les allergies aux pollens sont aussi saisonnières) ? Régresse-t-elle en hiver ?
  • Des chevaux de la même famille ont-ils présenté une Dere ?
  • Les signes présentés par le cheval régressent-ils si on le place dans un environnement sans insectes ?

Prise en charge de la Dere

La prise en charge d’un cheval atteint de dermite estivale récidivante repose sur deux axes : éviter au maximum les contacts entre les insectes piqueurs, et soulager l’animal.

Protéger les chevaux contre les insectes

Plusieurs actions peuvent permettre de limiter les piqûres d’insectes :

  • Placer les chevaux à Dere dans des pâtures sèches et ventées, ou en altitude. En effet, les culicoïdes, très sensibles au vent et ayant besoin d'un milieu humide pour se reproduire, ne peuvent y survivre.
  • Appliquer des insectifuges et/ou des insecticides sur l'ensemble du corps du cheval. Ces produits ayant dans cette espèce une action courte, il faut renouveler les applications très régulièrement.
  • La meilleure solution actuellement pour les chevaux au pré : la couverture-moustiquaire, à porter en permanence. Il en existe aujourd'hui des modèles très résistants et couvrant l'ensemble du corps. Elles peuvent même être imprégnées de produits répulsifs.
  • Rentrer les chevaux à l'écurie dès 17h00, les insectes étant très actifs en fin de journée. Pour que les insectes ne puissent pas entrer dans les bâtiments, protéger les ouvertures par des moustiquaires. Autre solution, placer à proximité des boxes des ventilateurs puissants, le flux d'air empêchant moucherons et moustiques d'approcher les chevaux.

Soulager le cheval

Une fois les premiers signes apparus, la mise en place d’un traitement est nécessaire.

  • La première chose à faire est de montrer le cheval à un vétérinaire pour que le diagnostic soit posé.
  • Le vétérinaire prescrira le traitement le plus adapté aux circonstances, en prenant en compte la physiologie et le mode de vie de l'animal.
  • Le traitement comportera dans la plupart du temps un volet externe : réalisation de shampooings et/ou applications répétées de lotions antiseptiques et calmantes.
  • Parfois, un traitement par voie générale (injections, comprimés) est nécessaire. Il pourra s'agir d'antibiotiques pour éliminer les surinfections bactériennes, ou de corticoïdes pour réduire les démangeaisons. Tous ces produits, non dénués d'effets secondaires, ne sont à utiliser que sur prescription vétérinaire.
  • Que faut-il penser de la désensibilisation ? Malgré quelques témoignages positifs, aucune publication scientifique n'en a démontré objectivement l'intérêt. Tout ce qu'on peut en dire aujourd'hui, c'est qu'elle peut éventuellement être tentée car elle est a priori dénuée d'effets secondaires négatifs.
  • Il est possible qu'à l’avenir d’autres traitements, agissant sur les médiateurs du prurit, soient disponibles pour le cheval comme cela l’est déjà pour le chien. Des recherches sont en cours2.

Références

  1. Dermatite estivale récidivante des équidés ou DERE, http://alizarine.vetagro-sup.fr/dp-cheval/maladies/DERE.html
  2. Fettelschoss-Gabriel A., Fettelschoss V., Olomski F., Birkmann K., Thoms F., Bühler M., Kummer M., Zeltins A, Kündig T.M., Bachmann M.F.: Active vaccination against interleukin‐5 as long‐term treatment for insect‐bite hypersensitivity in horses. Allergy. 2018, 1–11.